L E O F A N Z I N E O Q U I O M E T O L A O C U L T U R E O E N O S A C H E T S

21.10.10

Drôle d'oiseau

Quand j’étais petite, j’aurais voulu être une autruche. J’aurais adoré courir très vite et couver de gros œufs. Il parait que j’ai même essayé de convertir mon petit frère en enterrant sa tête dans le sable. Mais devant l’incompréhension de mon entourage, j’ai dû très vite renoncer à mes projets et j’ai fini par me résigner. Jusqu’à ce que l’autre jour, je découvre un oiseaux rare, volatile d’une étrange espèce qui m’a définitivement réconciliée avec les Struthioniformes:


A moins d'avoir passé la dernière décennie dans une grotte, vous savez l'engouement des groupes indie pour les noms d'animaux. Vous vous demanderez alors ce que vient faire ici un énième produit dérivé à la botte d'Animal Collective. Ce serait ranger injustement l'autruche jaune dans l'aquarium de votre zoo municipal. Car Yellow Ostrich n'a sa place dans aucune ménagerie. L'oiseau est trop rare, mériterait plutôt d'être exhibé comme attraction de foire. De celles fascinantes, qui ont été épargnées par la mélasse électronisées sans pour autant se perdre dans les méandres du folkeux-niais. Un tour de force admirable. D'autant plus qu'il est l'oeuvre d'un seul homme: Alex Schaaf.

Avant l'oiseau, il y avait donc l'homme, 22 ans, ricain et passionné de musique. Bambin au piano puis jeune adulte autodidacte à la guitare, Alex a joué dans plusieurs groupes (dont The Chairs) avant de consacrer à son projet solo : Yellow Ostrich. Solo? Vraiment? Rien n'est moins sûr à la première écoute de "Whale". En effet, on peine un peu a imaginer que ces jolies voix qui se superposent n'en sont en fait qu'une seule, démultipliée et réarrangée jusqu'à devenir un instrument à part entière, tout comme la guitare ou le tambour. Blasant.




Pourtant, Alex est seul, et modeste avec ça : "Tout ce que je fais sur mon album (The Mistress, on y vient, ndlr) est assez simple. Je crois que j'ai juste appris à jouer de manière à ce que cela corresponde à l'idée que je me faisais de mes chansons. Après, pour les choses plus compliquées, ce sont des amis qui ont joué". Et comme si cela ne suffisait pas, il est aussi hyper productif (7 EPs et un album sur son Bandcamp, sans parler des reprises dégotées sur youtube). Un peu workaholic, le monsieur ? : "Ecrire des chansons est très addictif mais c'est aussi difficile parce que ça ne vient que quand ça veut. Je ne peux pas forcer le processus et décider "maintenant, j'écris une chanson". Cela abouti rarement à quelque chose de bon. Les chansons me viennent généralement quand je me balade ou quand je suis dans un bar ou autre. A ce moment là, je commence toujours à paniquer et j'essaie d'enregistrer l'idée sur mon portable avant de tout oublier. Cela rend la chose très excitante parce que je ne sais jamais ce qui va venir. Mais c'est aussi possible que je n'écrive plus jamais de chanson de ma vie." Quid des covers ? "Les reprises sont d'une autre espèce. Tout est dans l'arrangement. La chanson existe déjà et le challenge, c'est d'arriver avec un truc qui soit à la fois innovant et intéressant. Cela dit, c'est toujours formateur et cool de reprendre des chansons que l'on aime. Mais rien ne vaut l'excitation que je ressens lorsque je travaille sur mes propres compositions."



En bref, on tient ici un drôle d'oiseau multitâches. Et le mieux, c'est que son album, The Mistress, est une réussite qui a déjà fait couler de l'encre sur le world wide web (mention spéciale à "Hate Me Soon" qui pose un regard lucide sur la facilité avec laquelle on oublie les gloires éphémères). Celui-ci est disponible à votre bon coeur sur le bandcamp. Et peut être même bientôt en vinyle sur kickstarter. On vous encourage d'ailleurs fortement à opter pour cette option car Alex Schaaf a besoin de vous autant que vous de sa musique : en effet, la production a exigé quelques sacrifices et il a été privé de beurre de cacahuète "super chunky".

<a href="http://yellowostrich.bandcamp.com/album/the-mistress">The Mistress by Yellow Ostrich</a>

Alors, c'est comment la vie sans "super chunky" ? "Plutôt dur. Avec le beurre de cacahuète "normal", t'as vraiment juste une tranche de pain avec du beurre de cacahuète alors qu'avec le chunky, t'es dedans dès la première bouchée. C'est comme un nouveau monde de saveurs qui s'ouvre à toi."

Difficile d'être plus convaincant.