Tu vois ce gus au regard effrayant ? Ben c'est Oliver Ackermann, le chanteur et guitariste des noisy New Yorkais A Place To Bury Strangers. Mais ce qui est plus flippant encore, c'est que juste avant, sur scène (au BT59 à Bordeaux), il avait engagé un combat de guitare avec son bassiste (et avait perdu), et failli reverser un ampli, tout casser quoi. J'avais peur de me retrouver face à un garçon inquiétant, dangereux et muet. Mais en fait non, il a été extrêmement gentil, m'a filé une bière et m'a raconté plein de choses un peu folles qui lui sont arrivées. D'ailleurs la photo ci-dessous vous montre le fort potentiel sympathie d'Oliver :
INTERVIEW A PLACE TO BURY STRANGERS
TEA : As-tu aimé le concert ?
Oliver : Ouais ça allait.
Pas trop fatigué ? Parce que tu sembles donner pas mal de ton énergie sur scène...
Hmm. Je ne sais pas. Non. Nous n'avons pas beaucoup dormi ces deux dernières semaines mais peu importe (il hausse les épaules), nous avons l'habitude. Je suppose que je vais bien.
Qui a fait les visuels du concert ?
Je les ai fait.
Vraiment?
Oui c'était bien ? Je n'ai jamais l'occasion de les voir, donc je ne sais pas si c'est bien ou pas.
Vos chansons sonnent très sombres, de quoi parlent-elles au juste ?
Oh, de plein de choses. Comme des réflexions sur la vie... C'est un peu un projecteur sur les moments et les émotions intenses de la vie, comme quand je suis vraiment déprimé ou vraiment heureux de quelque chose. C'est assez personnel.
Vous êtes censés être le groupe le plus bruyant de New York, tu n'as pas de gros problèmes d'audition ?
Non, je ne sais pas, je ne pense pas. Je joue de la musique très très forte depuis très très longtemps mais... (un type bourré arrive dans la salle en criant) Piss off! (rires). Donc je pense que je suis sûrement chanceux. Tu sais il y a beaucoup beaucoup d'amplis dans ma maison et c'est tellement marrant de les allumer tous et de jouer comme ça dans un pièce pas plus grande que celle-ci (Et la loge n'est pas bien grande). Donc peut être que ce sont juste mes oreilles qui sont faites de métal ou un truc du genre. Ou peut être que j'ai perdu toute mon audition et que je ne le sais pas. J'en sais rien.
Vous avez sorti un EP cette année, je suppose donc qu'un nouvel album est en préparation ?
Ouais, je ne sais pas pourquoi on tourne encore en fait... Nous n'arrêtons pas de sillonner les routes, ce qui est assez chouette, j'aime faire des concerts, mais nous n'avons à peine l'occasion d'être à la maison. Tu vois on a commencé à enregistrer le prochain disque mais nous n'avons pas de pause pour le faire réellement. Mais peut être l'année prochaine... Nous sommes sur la route en non-stop depuis genre 2007. C'est assez dingue. Nous avons eu environ deux mois de libre pour faire notre dernier disque, c'est pas beaucoup. Et depuis nous avons dû avoir maximum deux semaines à la fois. Mais cette année nous avons janvier et février de libre, peut être même jusqu'à mi-mars. Mais tu sais, par exemple pour cette tournée, notre manager nous a fait « Les mecs vous voulez jouer en France pour genre neuf jours ? » Et nous on a dit « Ouaiiiis ! Ça a l'air cool. » Et après, on te propose une tournée mais de 28 dates, et ainsi de suite... Mais peu importe, c'est marrant. Nous sommes heureux de ne pas avoir vraiment à se soucier de ce qui se passe. Heureusement, parce que ça pourrait te rendre suicidaire, c'est vraiment fou.
Quel est le pire concert que vous ayez joué ?
Euh... Je ne sais pas. Nous avons fait beaucoup de concerts où nous avons dû arrêter à cause de la police ou parce qu'on avait fait sauté l'électricité. Nous avons eu ce concert récemment, je crois que c'était à Cleveland, et nous avons fait sauté toute le courant du bâtiment, genre sept fois. Nous commencions notre chanson et "Pssssh !" Et après il fallait attendre quelques minutes avant de pouvoir recommencer et là encore "Pssssh !". Mais c'était quand même cool, ce n'était pas notre pire concert, c'était marrant.
Dion Lunadon (le bassiste qui vient de s'incruster dans la pièce) : Je crois que c'était ma faute.
Oliver : Donc n'importe lequel de nos concerts où il était était notre pire concert.
Dion : Eh ! (rires)
Oliver : Ils sont tous bons et mauvais (des gens ivres rentrent dans la salle et font un boucan pas possible) Désolé pour ça. Parfois on s'entend très mal. Et une fois je me suis blessé, une corde de guitare s'est coincée sous mon ongle, dans mon doigt, et j'essayais de l'enlever mais c'était comme enroulé, et il y avait du sang sur mon bras et je devais continuer de jouer. C'est fou, tu continues de jouer et tu saignes vachement, et t'es là genre « Où suis-je ? Qu'est ce que je fous ? »
Et tu ne casses jamais ta guitare à force de faire des combats avec ton bassiste à chaque concert ?
Oh si bien sûr, plein de fois. Tu dois juste penser à amener de la colle et d'autres trucs pour les réparer.
J'ai lu que votre van a été volé récemment ?
Ouais, c'était horrible. J'étais tranquille en backstage et là notre ingé son vient et fait « Le van a disparu » et on lui a dit « Ahaha, c'est super drôle, quelle blague », « Non sérieusement les mecs ». Apparemment il a été volé par des gens du voyage. Il y avait toutes nos affaires, sauf nos instruments parce que nous avions déjà fait le soundcheck et que tout été resté sur scène. Mais il y avait tous mes vêtements, tu sais j'avais des vêtements depuis que j'avais quatre ans, plein de trucs. Mais peu importe. Qu'est ce que tu peux y faire ? Si tu déprimes à cause de ça c'est mauvais. Mais ouais, ça craint.
Et vous êtes arrivés en retard ce soir aussi, vous avez eu un autre problème ?
Nous étions en retard parce que, donc, notre van a été volé en Italie et on en a loué un autre. En France on roulait et là le conducteur a fait un écart et on s'est pris la barrière. "Crrrr!" Et il y avait de la fumée et du feu. Il était coincé au milieu. Nous avons essayé de récupérer nos instruments, et il pleuvait des cordes, nous étions tous complétement trempés, il pleuvait sur nos instruments, et il y avait tellement de boue ! Donc on a dû réparer ça. C'est trop naze. (rires). Nous pensions que le pneu allait partir d'un moment à l'autre, nous avions vraiment peur. Et il y avait un autre truc cassé aussi. C'était une des choses les plus folles et effrayantes qui nous soient arrivées. Nous avons roulé dans la montagne, sous la neige... Tu vois, tous ces trucs marrants. Bien. (rires). Donc ne rejoignez jamais de groupe !
Et d'ailleurs, quelle est la chose la plus folle qui vous soit jamais arrivée ?
C'est une bonne question. Je ne sais pas. On fait toujours des trucs fous alors... Oh j'ai fait des conneries de toutes sortes. Genre euh, tu sais, sauter des toits, conduire comme... Mais je ne devrais pas le dire, si ma mère lit ça, elle serait déçue. Dion a fait plein de trucs fous. Quelle est la chose la plus folle que tu aies faite ?
Dion : C'est embarrassant.
Oliver : Dis leur !
Dion : La chose la plus folle que j'aie jamais faite, je la garde pour moi.
Oliver : Alors dis leur un autre truc fou.
Dion : Ok, donc j'habitais au sixième étage, et une fois où j'étais vraiment bourré, je suis grimpé sur le toit et ai sauté du bord pour aller toquer à la fenêtre de ma femme.
Si tu étais une femme célèbre, qui serais-tu ?
Oh... Hum... Je ne sais pas ? Qu'est ce que tu en penses ?
C'est toi qui trouves la réponse !
C'est une question difficile. J'adorerais être une femme, ce serait fantastique bien sûr, pourquoi pas ? Aha, vous me regardez genre « Non, tu ne voudrais pas, crois moi ! » (rires)
Combien de pédales as-tu sur scène ?
Je n'en utilise pas tant que ça. Une, deux, trois.. Six. Mais elles sont toutes multifonctions. Je les fabrique. Nous faisons beaucoup ça, pour beaucoup de différentes chansons. Mais s'il y avait trop de choses devant moi, je ne sais pas si je pourrais me concentrer sur le jeu. En fait les pédales ne comptent pas vraiment, le plus important c'est la guitare.
Le fanzine s'appelle TEA, tu aimes le thé ?
Oh oui, j'en buvais beaucoup plus à une époque que maintenant, mais j'adore boire du thé, c'est bon.
Et pour finir, as-tu une blague ?
Est-ce que j'ai une blague ? Ok, donc le pape, l'homme le plus intelligent du monde et un scout sont dans un avion. C'est une blague que m'a raconté ma grand-mère. Et les réacteurs s'arrêtent. L'avion descend et le problème c'est qu'il n'y a que trois parachutes alors il faut décider qui doit les prendre. Le pilote dit « Je dois descendre, je sais ce qui s'est passé, je dois le dire aux autres pour que cela ne se reproduise plus » donc tout le monde est d'accord et il prend un parachute et descend. Ensuite l'homme le plus intelligent du monde dit « Vous savez, je suis l'homme le plus intelligent du monde, je dois prendre un parachute », donc les autres sont ok et il descend. Et ensuite le pape dit au scout « J'ai vécu longtemps, une belle vie, toi tu viens de commencer la tienne, tu dois prendre le dernier parachute ». Et le scout dit « Ne t'inquiète pas, il y a encore deux parachutes, l'homme le plus intelligent du monde a pris mon sac à dos ».
Ah oui, en France on remplaçait l'homme le plus intelligent du monde par George W Bush.
Oh elle est bonne elle !
Oliver nous a aussi conseillé le groupe Natural Child, de Nashville, et nous a chaudement remerciées de l'avoir interviewé. Qui aurait cru que l'auteur des albums Exploding Head et A Place To Bury Strangers puisse être aussi adorable ?