L E O F A N Z I N E O Q U I O M E T O L A O C U L T U R E O E N O S A C H E T S

23.6.16

[GUEST] Artikl kurwa dobra polska muzika


Tourisme musical : la Pologne
Par Albertine

Un séjour Erasmus, c'est l'occasion de s'immerger complètement dans la culture locale. Après avoir testé toutes les sortes de plats à base de choux et tous les alcools faits maison, j'ai décidé de me pencher un peu plus sur la musique de mon pays d'adoption temporaire : la Pologne. Et ce n'est pas une mince besogne. À ma grande surprise, j'ai bien failli me perdre dans l'immensitude de l'offre musicale. Je me permets donc d'être votre guide afin de vous présenter une sélection basée sur mes préférences et sur l'originalité.

Commençons par du traditionnel en vous relatant ma première familiarisation avec la musique polonaise il y a quelques années. C'était un dimanche, dans un salon familial, une odeur de pierogis sauce beurre-oignons flottait depuis les casseroles et Pod Budą sortait des enceintes. Formé en 1977 par six membres, le groupe a rencontré un immense succès qui perdure encore après 17 albums (quand même). Bien qu'étant dans le registre des "musiques de parents", on finit par aimer. C'est très poétique, enveloppant et donc parfait pour les fins de journées nostalgiques. Mes préférées  : "Blues o starych Sąsiadach‬" (spécialement les refrains) et "Ta Sama Milosc".


Restons dans la mélancholie mais électronique cette fois. Découvert lors d'une d'une errance dans Youtube il y a de ça quasi une année, Ptaki est une petite pépite. Signifiant "oiseaux" en polonais, ce duo de DJ varsoviens est depuis très haut placé dans ma hiérarchie musicale notamment avec les morceaux "Krystyna", "Marek", "Jak Ptaki"  ou encore "Warsaw". Le rythme est d'une telle subtilité que le bassin est obligatoirement secoué dès les premières secondes, ceci recouvert de quelques sons finement placés ci-et-là. Bref, c’est fin, répétitif comme on aime mais sans jamais lasser. À écouter en boucle quitte à avoir de l'arthrose.
En juin 2015, ils ont sorti un album composé de recyclage de morceaux polonais des années 70, le résultat est plutôt convainquant même si c'est moins groovy que les débuts. À écouter ici


Continuons la leçon de vocabulaire avec Stara Rzeka qui signifie "vieille rivière", dont l'initiateur, Jakub Ziolek, est un quasi ermite reclus dans une forêt au nord du pays. Multi-instrumentiste, compositeur et producteur, il est à la base de nombreux groupes. Introduction donc avec Stara Rzeka, un "groupe" dans lequel il fait tout. Ce qui ne manque pas d'impressionner car les sonorités se succèdent, allant du krautrock au drone en passant par le black métal. Ainsi les morceaux ne se ressemblent pas mais le résultat global est plutôt noir et très puissant. Par exemple, le morceau "‪Prześwit‬". Et pour continuer, allez écouter l'album entier de "‪Cień chmury nad ukrytym polem‬".


Passons à Alameda 5 dont la composition est évoluante - d'où le chiffre 5 - et qui rassemble des musiciens gravitant autour de Jakub Ziolek. Au premie abords on ressent la recherche d'une logique dans la puissance des instruments, poussant parfois à devoir s'accrocher. Mais ça finit par mordre. L'Internet les qualifie de "japanese noise-psychedelia" ou encore de "kraut trance". Tout ce que je sais, c'est que ce chaos orchestral à base de basses interminables et d'un infinitude d'instruments est captivant. Ecoutez un album entier  et en bonus : Alameda 3 - ‪Teraz widzę już tylko rzekę...‬

De la puissance des instruments à celle des paroles, parlons de Maria Peszek. Connue pour sa force textuelle, cette artiste très politisée ne passe pas par quatre chemins, grand bien fasse a la Pologne! Nul besoin de vous expliquer davantage, son dernier titre s'appelle "Modern Holocaust", et le clip n'en promet pas moins. Et puis grâce à elle, j'ai appris que Miley Cyrus n'avait rien inventé : 

Dommage de ne pas comprendre la subtilité des textes, je me contenterai donc d'apprécier sa voix rauque et ses clips provocateurs.

Un peu plus soft dans le message, mais pas moins chargé d'ironie sur la société polonaise, on trouve Mister D. L'auteure de ce concept musical, Dorota Maslowska, est également une écrivaine a succès, la "Françoise Sagan polonaise" m’a-t-on dit. En effet, elle publie son premier roman à 19 ans, qui est un succès entre autre par son jeu avec la langue polonaise. Elle ne crache pas sur l'usage d'un langage cru et vulgaire, une vulgarité que l’on retrouve dans ses clips. Les plaçant directement dans la catégorie "pépites de Youtube" à ressortir pour les soirées clips, voir "Haj$" (version polonaise de "fric”) et ‪"ŻONA PIŁKARZA" ‬(la femme du footballeur). Le morceau Chleb ("pain" en polonais) ironise sur les crânes rasés porteurs de jogging que l'on désigne sous le mot "dres" en polonais (qui désigne en fait les pantalon training eux-mêmes).


On retrouve une version miniature de ces "dres" dans le clip "Ego" de Rysy, un très bon groupe naissant de la scène électro. Arrière fond de basses, frôlant le kitsch avec le chant de Justyna Święs (chanteuse de 18 ans, déjà connue pour son autre projet The Dumplings), Rysy se destine aux amateurs d'électro sobre, sans chichi, qui ne rechignent pas devant une voix ajoutée. En somme c'est juste assez contrôlé pour vous faire hocher de la tête dans le bus. Et, petite leçon géographique, Rysy c'est aussi la montagne la plus haute de Pologne (2503 mètres) dans les Tatras au Sud. À écouter : "Brat" et le très bon LP Traveler.


Et pour terminer, mon guilty pleasure polonais : Dawid Podsiadło - le beau gosse national qui pousse la chansonnette. Évidemment, il sort de X Factor, évidemment, il chantait même avant sa naissance, évidemment ses albums se sont placés en numéro 1 des ventes en Pologne en 2013 et en 2015 et évidemment, il te reste dans la tête. Mais ses clips sont pas trop cucul et le son n'est pas trop mauvais. Et puis il me fait rire sur Instagram (où on découvre qu'il est moins parfait que sur les pubs) et je suis accro à la deuxième partie du clip de “W dobra Strone“ où on est catapulté dans sa vie intime. 


Voilà, terminus, tout le monde descend. Si vous avez envie de vous immerger dans le monde musical polonais physiquement, vous pouvez retrouver la quasi totalité de ces groupes au festival Open’er à Gdynia début juillet, la programmation est à tomber par terre ceci dit en passant. Pour encore plus de productions locales plutôt dans le genre électronique : Audio River à Plock ou le Tauron Festival et le Off Festival à Katowice.

Merci les copains polonais de sang ou de cœur pour vos conseils !