L E O F A N Z I N E O Q U I O M E T O L A O C U L T U R E O E N O S A C H E T S

6.4.10

Le XIXème siècle, c'est chouette


ÖDLAND
OTTOCENTO

Depuis dix jours, je fais chaque nuit le même rêve. Oh, il s'y passe toujours de différentes péripéties, mais la trame principale reste la même. Je suis au Pays des Merveilles, ni plus ni moins. Et celui de Lewis, s’il vous plaît, celui du XIXème siècle, avec ses pages jaunies et ses jolies illustrations de l’auteur en noir et blanc, pas celui de Tim, d’aujourd’hui, avec ses vedettes américaines et sa technologie 3D. Au XIXème siècle et donc dans mon rêve, il n’y a pas de cinéma, les frères Lumières sont encore des bambins.
Mais j'exagère, tout n'est quand même pas comme chez Lewis Carroll. La grande différence par rapport au livre, c'est qu'il y a cinq nouveaux personnages. Ils s'appellent Alizée et Léa Bingöllü, Lorenzo Papace, Alice Tahon et Isabelle Royet-Journoud. Ils viennent du 21è siècle aussi, malgré ce que leurs costumes et leur manière de parler pourraient laisser penser, et vivent d'ordinaire à Lyon, quand ils ne se baladent pas dans les rêves. Ensemble, ils forment Ödland, c'est un curieux nom qui suscite l'imaginaire, ont-ils expliqué une fois au Chapelier fou. Ce sont des musiciens acoustiques. Alizée chante, tantôt en français, tantôt en anglais. Elle a une voix aigüe et plutôt enfantine, qui parfois prend des inflexions inquiétantes. J'aime beaucoup quand Ödland joue. On croirait une boîte à musique améliorée, où violon, violoncelle et piano pourrait s'épanouir à leur guise. Leurs chansons font surtout référence à Alice au Pays des merveilles. Il y a la Reine de Coeur ("The Queen Of Hearts"), la Chenille ("The Caterpillar") et on peut même boire du thé pendant plus de dix minutes avec le Chapelier fou, le Lièvre de Mars et le Loir ("Un Thé Chez Les Fous"). J'aime beaucoup le thé.
De temps à autre, le rêve s'échappe de l'univers d'Alice, mais je ne suis jamais perdue tout à fait, puisque Ödland et le XIXème siècle m'accompagnent. Les Lyonnais racontent de drôles d'histoires, comme celle de Mathilde Rossignol, ma préférée, jeune fille piétinée lors d'un bal en 1897, et dansant depuis dans les bras de Gustave le fantôme. Ils aiment aussi beaucoup s'extasier sur les dernières inventions : le "Train", la photographie ("Halogénures d'Argent"), ou encore le télégraphe ("De Vienne à Paris"). Les cinq membres d'Ödland sont passionnants, on dirait des personnages de livres, ou des magiciens. Lorenzo, qui est à l'origine du projet et avec qui j'ai déjà pris une tasse de thé dans des rêves antérieurs, m'explique comment ils ont tout fait eux-mêmes. Ils ont enregistré leurs chansons à la maison et en une seule prise à chaque fois, et en acoustique bien sûr, ont fait de (jolies) photographies, Lorenzo s'est occupé du graphisme, et ils ont décidé d'auto produire et distribuer leur premier album, Ottocento. Même que leur CD (dans mon rêve, cet anachronisme ne me choque même pas) ne coûte que dix euros (vous pouvez faire la conversion en francs), et qu'il vous sera envoyé dans une enveloppe avec de belles écritures et avec un morceau du clip de "The Queen Of Hearts" à l'intérieur. Le rêve dure plus d'une heure, je voyage dans le temps avec ces cinq joyeux drilles et leur musique, rencontre d'autres étranges personnages et vois de nouveaux paysages. Et puis je me réveille, et rappuie sur le bouton.

Depuis dix jours, je fais le même rêve. Depuis dix jours, Ottocento d'Ödland passe en boucle chez moi.

Et parce que ce genre de rêve ne se refuse pas, offrez-vous donc l'album ici.

et (re)lisez l'interview de Lorenzo Papace pour TEA