Hier soir, je suis allée à un concert de vieux. En apparence en tout cas, je détonnais au milieu de la masse capillaire gris-blanc. Mon voisin me l'a d'ailleurs gentiment fait remarquer: "Vous n'êtes pas très nombreux ce soir" et j'ai eu droit aux regards curieux style "oh-tiens-il-y-a-quand-même-encore-des-jeunes-qui-s'-intéressent-à-la-culture". Comme s'il devait forcément y avoir un clivage entre les générations. Bon, c'est vrai, le jazz manouche c'est ringard, on est loin des années 30/40. Mais il n'y a aucune raison de ne pas admirer la grande virtuosité de ses interprètes. Ça vaut même une mention ici.
FLORIN NICULESCU TRIO
Hommage à Stephane Grappelli
11/10/12, Salle communale Onex
Hommage à Stephane Grappelli
11/10/12, Salle communale Onex
Hier soir j'ai donc vu une immense dale du violon jazz. Il s'appelle Florin Niculescu (allez voir son site digne de la Gazette du Mauvais Goût) et il en impose sévère, autant par son physique que par ses qualités de musicien. Brillant soliste classique à l'origine, il a réorienté sa carrière vers le jazz après sa rencontre avec un certain "fils de" Reinhardt (Babik) et se produit aujourd'hui aux côtés d'autres "grands" tels que Angelo Debarre (que vous avez peut-être vu dans Gainbourg, vie héroïque), Didier Lockwood ou Birelli Lagraine. Name dropping classieux qui vaut mieux que n'importe quelle distinction classieuse, fut-ce le premier prix du concervatoire X ou du concours "insérer-le-nom-d'un-compositeur-connu" Y.
Vous l'aurez compris, Florin Niculescu n'est pas tombé de la dernière pluie dans le monde des violoneux. Soit. Il fallait donc qu'en violoniste amatrice j'aille voir de mes yeux comment la bête, immense et pataude, parvient à placer toutes ces notes en un rien de temps, alors que ses doigts sont au moins aussi larges que la paume.
Ben j'ai vu. Les gestes précis dès l'entrée. Des mouvements de bras et de mains fluides et pas seulement quand il est en contact avec son instrument, non vraiment, tout le temps. Et là il se met à jouer, sans prévenir, et il se balade le long de son manche. Putain, on s'est pas foutu de ma gueule.
Les accompagnateurs aussi étaient pas mal. On a eu droit à Hugo Lippi et Samuel Huber - inconnus au bataillon mais bien quand même. Quoi que, au début, Hugo-la-guitare n'assurait pas trop niveau accompagnement, il était même décalé parfois. Mais comme Niculescu improvisait à tout va dans tous les sens, on peut comprendre que ce soit parfois déroutant.
Parlons-en justement des impros de Florin. Au fil des années et fort de son bagage classique, de ses collaborations diverses et d'un background tzigane certain, le violoniste a développé un langage sautillant. Il pique partout, balance des clins d'oeil à la pelle et fait voler ses doigts de haut en bas du manche en y incrustant des doubles cordes et même des séries d'harmoniques, le salaud. Pour les violonistes en herbe, c'est un monstre sacré. Il ne semble pas connaître les barrières techniques qui nous font suer, nous, pauvres mortels. C'est beau à voir même si j'ai passé mon temps à l'insulter dans ma tête ARRHCONNARDPUTAINJYARRIVERAIJAMAISMOISALAUD tellement j'étais sur le cul. Voyez les vidéos vous mêmes et notez l'oeil malicieux du musicien qui s'amuse et qui aime bien provoquer ses collègues dans un dialogue de plus en plus compliqué:
Donc là c'est Debarre à la guitare (il a la même tête que mon beau père ouéoué).
La démonstration de haute-voltige m'a par ailleurs rappelé la phrase lâchée par un camarade étudiant en musicologie "Non mais moi le jazz je ne comprends pas, c'est rien d'autre qu'une prouesse technique à mes yeux". Il a quand même un peu raison. On choisi de comprendre ou pas l'harmonie jazz. On se lasse de la forme standard - impro - standard ou pas. Et on goûte ou non au côté folklore/tzigane du pendant manouche de l'affaire. Mais quand même, il suffit de lire les écrits de Kerouac sur le be-bop (pendant que j'y suis, autant tout mettre dans le même sac, allez) pour comprendre ce que ça peut faire au ventre des envolées de notes paf-dans-ta-gueule. C'est juste que les instruements du genre sont le vecteur de la violence d'une jeunesse d'un autre temps.
Enfin bref, pour faire court, hier soir j'ai vu un concert incroyable pour de multiples raisons. L'intitulé disait "hommage à Stephane Grappelli" (le violon du Quintette du Hot Club de France, celui qui a fait la plus belle sérénade du monde entier: "Darling je vous aime beaucoup" en jonglant entre les langues comme Renaud) et c'était comme un prétexte pour noyer des thèmes connus au milieu d'un tas de notes "fioritures" improvisées. Pas de redite ou de pâle copie cependant, juste des doigt qui contournent les standards "Minor Swing", "Daphne" et. al. et une ambiance genre "la cave de tonton Boris V.". Avec les types de sa génération.
Vous l'aurez compris, Florin Niculescu n'est pas tombé de la dernière pluie dans le monde des violoneux. Soit. Il fallait donc qu'en violoniste amatrice j'aille voir de mes yeux comment la bête, immense et pataude, parvient à placer toutes ces notes en un rien de temps, alors que ses doigts sont au moins aussi larges que la paume.
La Bête
Ben j'ai vu. Les gestes précis dès l'entrée. Des mouvements de bras et de mains fluides et pas seulement quand il est en contact avec son instrument, non vraiment, tout le temps. Et là il se met à jouer, sans prévenir, et il se balade le long de son manche. Putain, on s'est pas foutu de ma gueule.
Les accompagnateurs aussi étaient pas mal. On a eu droit à Hugo Lippi et Samuel Huber - inconnus au bataillon mais bien quand même. Quoi que, au début, Hugo-la-guitare n'assurait pas trop niveau accompagnement, il était même décalé parfois. Mais comme Niculescu improvisait à tout va dans tous les sens, on peut comprendre que ce soit parfois déroutant.
Parlons-en justement des impros de Florin. Au fil des années et fort de son bagage classique, de ses collaborations diverses et d'un background tzigane certain, le violoniste a développé un langage sautillant. Il pique partout, balance des clins d'oeil à la pelle et fait voler ses doigts de haut en bas du manche en y incrustant des doubles cordes et même des séries d'harmoniques, le salaud. Pour les violonistes en herbe, c'est un monstre sacré. Il ne semble pas connaître les barrières techniques qui nous font suer, nous, pauvres mortels. C'est beau à voir même si j'ai passé mon temps à l'insulter dans ma tête ARRHCONNARDPUTAINJYARRIVERAIJAMAISMOISALAUD tellement j'étais sur le cul. Voyez les vidéos vous mêmes et notez l'oeil malicieux du musicien qui s'amuse et qui aime bien provoquer ses collègues dans un dialogue de plus en plus compliqué:
Donc là c'est Debarre à la guitare (il a la même tête que mon beau père ouéoué).
La démonstration de haute-voltige m'a par ailleurs rappelé la phrase lâchée par un camarade étudiant en musicologie "Non mais moi le jazz je ne comprends pas, c'est rien d'autre qu'une prouesse technique à mes yeux". Il a quand même un peu raison. On choisi de comprendre ou pas l'harmonie jazz. On se lasse de la forme standard - impro - standard ou pas. Et on goûte ou non au côté folklore/tzigane du pendant manouche de l'affaire. Mais quand même, il suffit de lire les écrits de Kerouac sur le be-bop (pendant que j'y suis, autant tout mettre dans le même sac, allez) pour comprendre ce que ça peut faire au ventre des envolées de notes paf-dans-ta-gueule. C'est juste que les instruements du genre sont le vecteur de la violence d'une jeunesse d'un autre temps.
Enfin bref, pour faire court, hier soir j'ai vu un concert incroyable pour de multiples raisons. L'intitulé disait "hommage à Stephane Grappelli" (le violon du Quintette du Hot Club de France, celui qui a fait la plus belle sérénade du monde entier: "Darling je vous aime beaucoup" en jonglant entre les langues comme Renaud) et c'était comme un prétexte pour noyer des thèmes connus au milieu d'un tas de notes "fioritures" improvisées. Pas de redite ou de pâle copie cependant, juste des doigt qui contournent les standards "Minor Swing", "Daphne" et. al. et une ambiance genre "la cave de tonton Boris V.". Avec les types de sa génération.