Pour notre dossier sur les fans, on a demandé à des gens de nous raconter comment ils vivaient la chose.
Propos et images : Guillaume
Mis en texte par la TEAm
"J'avais quinze ans quand on m'a copié une cassette de Violator. A l'époque j'écoutais que de la merde. C'est le premier groupe un peu sérieux que j'ai écouté. J'ai vu qu'ils jouaient à la Patinoire de Bordeaux. Je crois que c'est le seul groupe étranger qui a rempli deux soirs de suite la Patinoire. Et ça a été mon premier concert. Après, je les ai revus à l'album suivant, Songs of Faith and Devotion... Et là le chanteur avait complètement changé de look, il avait le look un peu à la Jésus, cheveux longs, sûrement gras... J'ai fait pareil mais un peu plus tard, quand j'ai eu plus confiance.
Après il y a eu un gros blanc de quatre ou cinq ans. Dans les années 90 Depeche Mode c'était un peu passé de mode. J'ai continué à les écouter tout en m'ouvrant à d'autres choses. A l'époque c'était dur d'avouer qu'on pouvait aimer à la fois des trucs comme PJ Harvey, les Thugs, et Depeche Mode. Ils avaient vraiment une réputation de ringards. J'assumais pas trop de le dire. C'était pas très avouable.
Je suis retourné les voir en 2001, avec ma place cette fois, et dans la queue, je voyais qu'il y avait deux types avec une caméra qui interviewaient les gens qui attendaient. De loin j'ai reconnu Anton Corbijn, le photographe qui fait les clips de Depeche Mode ! Et à un moment donné, ils regardent vers moi et viennent me voir. Je commençais à flipper un peu. Ils m'ont demandé si je voulais faire une interview pour le DVD sur la soirée à Bercy ! Plus tard quand j'ai acheté le DVD, j'ai pu vérifier que j'étais bien dans les bonus. Ils ont gardé une phrase seulement, mais bon, j'étais trop content. Un sacré souvenir.
Je les ai revus une dernière fois à Benicassim en 2006, ils ont fait un album qui était encore bien, Playing the Angel. Mais je commençais à décrocher parce que ce qui m'a fasciné dans Depeche Mode, c'est que je les ai suivis pendant quinze ans, et pendant quinze ans, ce groupe ne m'a jamais déçu. Je trouvais qu'à chaque album ils se renouvelaient, ils allaient chercher dans différentes directions, le trip hop, l'electro un peu plus minimaliste... Ils reviennent de loin, ils ont un sacré parcours. Et à partir de 2005 j'ai trouvé qu'ils se reposaient un peu trop sur leurs acquis. Donc après j'ai vraiment arrêté d'écouter car je trouvais qu'ils se contentaient de remplir les stades. Et c'est ce qu'ils sont devenus, un groupe qu'on va voir au stade de France comme on va voir Mylène Farmer ou U2. En fait je préférais quand ils étaient considérés comme has been car c'était plus mon truc à moi. J'aime bien le côté populaire des groupes, tant qu'il y a de la recherche derrière, c'est pour ça que ça ne m'avait pas posé de problème avant.
Y a des groupes que j'ai suivis pendant longtemps, comme les Cure par exemple, qui ont toujours fini par me décevoir. A un moment donné, ils vieillissent et on perd la magie. Pendant un long moment j'ai cru que ça n'arriverait pas à Depeche Mode, qu'ils étaient intouchables. Plus maintenant. Y a de jeunes groupes d'electro pop qui ont des choses beaucoup plus intéressantes à dire que Depeche Mode aujourd'hui.
Depeche Mode aujourd'hui... Je réécoute les albums avec plaisir. Mais ce qu'ils font maintenant ne me concerne plus. Je continue à regarder de loin, mais je n'aime pas trop la nostalgie en musique. J'aimerais pas aller les voir pour me dire "Han putain c'était trop bien avant". J'ai besoin que ça représente quelque chose pour moi dans le moment présent. Dans ce sens là, j'ai pas envie de payer ma place deux cent euros pour aller les voir.
J'ai une super anecdote quand même. Quand ils ont sorti Ultra a la fin des années 90, ils avaient fait une interview sur Funradio, qui était une radio pas mal à l'époque. Je l'ai enregistrée avec une cassette, évidemment. Des fans pouvaient leur poser des questions. Et il y a une nana qui appelle et qui dit qu'elle est de Bordeaux. Et je me dis tiens, c'est marrant. Je me souviens d'une seule question, elle avait demandé à Martin Gore s'il portait des slips ou des caleçons.
Quelque temps après, ma cousine me présente à une amie à elle qui est fan de Depeche Mode, on sympathise, je finis par sortir avec cette fille. Et un jour on rediscute de Depeche Mode et elle me dit "Ah tiens c'est drôle, un jour je les ai appelés à la radio !". Je réécoute la cassette, et j'hallucine, c'était elle. La cassette je l'ai toujours d'ailleurs. Donc je n'ai jamais rencontré le groupe en vrai, mais je suis sorti avec une fille qui leur avait parlé à la radio. C'est encore mieux en fait, non ?"