INTERVIEW MEN
Pour ceux qui n'arrivent toujours pas à situer, MEN, c'est le projet de JD Samson, du groupe Le Tigre, et c'est encore plus dansant. De passage au festival Les Femmes S'en Mêlent au Chabada à Angers, le trio a accepté de répondre à nos questions. Une ambiance décontractée avec JD qui, non contente d'avoir une moustache, pousse le mimétisme jusqu'à abandonner sa main sur son entrejambe, Ginger riant à toutes les répliques, et Michael, ironiquement la personne la plus féminine du groupe.
Pouvez-vous vous présenter ?
JD : Bien sûr ! Je m'appelle JD Samson, et elle c'est Ginger Brooks Takahashi et lui Michael O'Neill et ensemble nous sommes MEN. Nous sommes un collectif musical et artistique basé à Brooklyn et là nous sommes en tournée pour jouer de la musique.
Comment appréhendez-vous la tournée européenne qui arrive ?
JD : Nous sommes vraiment très excités. C'est notre deuxième tournée en Europe et nous n'avions pas passé beaucoup de temps en France la dernière fois donc nous sommes très excités à l'idée de voir de nouveaux visages et de nouvelles villes et de voyager...
Et d'être au festival Les Femmes S'en Mêlent ?
JD : Ouais. J'ai vraiment du mal à dire le nom, c'est pour ça que je ne l'avais pas encore mentionné. Mais nous sommes très heureux d'être au festival. Et en fait nous connaissions Jessie Evans depuis genre super longtemps. Elle jouait avec des potes à nous il y a genre dix ans. Mais maintenant elle vit à Berlin et est en solo. On regardait sur le site web du festival avec qui nous allions jouer et on était là genre "Qui est-ce ? On l'adore !" et après on a réalisé qu'on la connaissait déjà.
Ginger : Ouais, et on a aussi des amis en commun avec Tender Forever avec qui on joue sur d'autres dates. Donc ce festival, on dirait notre scène, donc c'est cool.
Vous savez ce que "les femmes s'en mêlent" signifie ?
JD : Les femmes... indépendantes ? Non...
(On leur explique)
Ginger : C'est un peu comme "les femmes indépendantes" !
JD : On m'a demandé plusieurs fois de jouer dans ce festival avant, avec d'autres formations. Donc j'ai toujours entendu parler de ce festival, mais je n'y avais jamais joué donc il y avait une sorte de mystère autour de lui, genre "Qu'est ce que c'est ? Qui y va ? Mais de quoi ça parle au juste ?"Donc c'est vraiment excitant d'être ici. Et la nuit dernière il y avait définitivement tellement de filles fières que j'ai senti que c'était très puissant et charmant ce qui se passait dans la salle. Je veux dire, je pense que pour nous, c'est très intéressant de jouer dans des évènements comme ça. Et on est aussi très intéressés pour jouer dans des évènements gays. Parce que nous sommes un groupe homosexuel, donc c'est aussi important pour nous.
Pourquoi avoir choisi le nom "MEN" ? Un choix idéologique ?
JD : Je pense que c'était un choix idéologique. Et ça devient une réflexion sur le genre et l'idée que n'importe qui peut être n'importe quoi s'il le veut.
Et quelle est la part d'idéologie dans vote musique ?
JD : Je pense que la politique a un rôle important dans notre musique et notre action. Mais on ne veut pas être un groupe qui, genre, tu vois, prêche quelque chose. Je pense qu'on veut juste aider les gens à être qui ils veulent vraiment être et à savoir ce en quoi ils croient vraiment, tout en s'amusant.
Ginger : Certaines personnes disent que nous faisons de la "gay power music".
JD : Ouais, mais on pense aussi que c'est important que les gens comprennent la sentimentalité de la musique et du fait qu'on liste ces faits politiques ou ces choses auquel on pense. Mais on ne veut pas les hurler ou les chanter ou les dire comme si nous prêchions. Je pense que nous les disons du genre "ces choses nous touchent personnellement", en tant qu'humains cela nous affecte tous. C'est juste à propos de la politique et des émotions.
Ginger : Ouais. Et c'est poétique. Et c'est aussi comme "Hey, nous sommes dans ce monde tous ensemble".
Vous vous considérez davantage comme un collectif qu'un groupe de musique ?
JD : Quand nous avons commencé, je pense que nous aimions vraiment l'idée de nous considérer comme un collectif, parce que nous faisions différentes collaborations avec d'autres artistes ou musiciens... Je pense que c'est toujours important pour nous de rester ouvert. Donc nous continuons de faire ça. Mais je pense aussi que maintenant, nous sommes tous les trois le coeur de ce groupe, et on a tourné ensemble...
Ginger : Je dirais que nous sommes un groupe et que nous faisons des performances et que nous collaborons avec d'autres gens.
Oui, d'ailleurs vous donnez beaucoup d'importance à vos performances live, pourquoi ?
JD : Je pense qu'une des raisons pour laquelle on y fait attention est probablement parce que quand nous allons voir des groupes, on apprécie vraiment qu'ils donnent beaucoup d'énergie sur scène au lieu de seulement regarder leurs pieds et jouer de la guitare comme... Je veux dire, j'imagine des personnes écrire sur Facebook : "C'était trop bien ce soir d'aller au concert et de voir une bande de types en chemises de flanelle regarder le sol"...
(elle remarque qu'elle a elle-même une chemise et rit)
Ginger : Notre boulot, c'est de faire des performances, nous voulons interagir avec le public.
JD : Et ce que tu donnes au public, il te le rend en retour.
Quel est le pire concert que vous ayez fait ?
(rires)
Ginger : C'est dur ! Quelle question méchante ! (rires)
JD : Je ne sais pas. On devrait y penser...
Ginger : Chacun de nous à son pire concert. Euh... On en a joué un pas terrible la semaine dernière, à Austin, au Texas. Et il faisait vraiment froid dehors dans la journée et on a du porter nos vêtements, et par dessus nos costumes, et encore par dessus nos manteaux.
Michael : Il faisait super froid. Mais c'était cool sinon.
JD : C'était vraiment drôle. Ce n'était pas vraiment notre pire concert.
Michael : Ce n'était pas notre pire concert mais on était au Luxembourg une fois. On a commencé le set et il y avait quelque chose qui n'allait vraiment pas. C'était si affreux et si mauvais qu'on a posé nos instrument, quitté la scène et sommes retournés backstage. Et on s'est genre regroupés, et puis on est revenus.
Ginger : Je pense qu'un show peut être mauvais à cause du son qui est très mauvais ou alors parce qu'il n'y a personne, pas de public.
JD : C'est compliqué parce que, tu vois, comme on le disait, ce que tu donnes au public, il te le rend. Mais si tu donnes et qu'il n'y a que deux personnes dans la salle, c'est étrange. On a besoin de sentir de l'énergie dans la salle.
Ginger : Et on veut que les gens s'amusent et dansent.
JD : Mais c'est aussi incroyable de jouer un set devant dix personnes et de voir de la joie.
Alors, ce premier album ?
JD : On a fini de l'enregistrer. Il faut juste le mixer, le masteriser, et on a besoin d'un label. Ce qui est un peu sur quoi repose tout le reste.
Vous n'avez toujours pas de label ?!
JD : On a quelques options, mais on essaie juste de penser à qu'est ce qui a le plus de sens pour nous pour le moment. L'industrie de la musique est un milieu assez étrange, donc on essaie d'y réfléchir beaucoup.
JD, sur scène, tu portes une maison sur la tête, où te sens tu chez toi ?
JD : Wow ! Oho ! (rires) Je me sens chez moi quand je suis avec des personnes que j'aime, comme mes grands parents. Mais je me sens aussi chez moi sur la route, je pense que ça a été ma maison pendant des années.
Michael : Je me sens chez moi à New York. C'est là qu'on vit et on a une merveilleuse communauté d'amis qui vivent là-bas donc... c'est comme une maison.
Si vous étiez une femme célèbre, qui seriez vous ?
(très très long silence)
JD : Je peux dire avec quelle femme célèbre je voudrais... sortir...
Michael : Je pensais à Whoopi Goldberg. (rires) C'est ma personne intérieure.
Ginger : Qui est ma personnalité intérieure ?
JD et Michael : Yoko Ono !
Ginger : (rires) OK, je prends ça, Yoko Ono.
Qu'est ce que vous aimeriez que les gens disent en revenant d'un de vos concerts ou après avoir écouté vos chansons ?
JD : J'aimerais que, genre, ils se sentent éveillés et inspirés.
Michael : Je voudrais qu'ils rentrent à la maison et qu'ils fassent quelque chose de nouveau.
JD, qu'est ce que tu préfères, jouer dans de petits clubs avec MEN ou dans de plus grosses salles avec Le Tigre ?
Ginger et Michael : Oh ! (rires)
JD : J'aime les deux. Ce qui est vraiment différent, c'est que Le Tigre a enregistré des disques. Donc c'est différent de MEN où l'on joue devant des gens qui entendent ça pour la première fois. C'est incroyablement différent. Mais tu sais, on a joué avec de gros groupes comme Gossip ou Peaches avec MEN et c'était vraiment super. On a expérimenté de plus gros clubs, c'était chouette.
C'est drôle, tu prononces "le tigreu", au lieu de "le tigr"...
JD : (elle essaie de le prononcer à la française, n'y arrive pas) Ouais, tout ça c'est du faux français. Genre, c'est trop cool d'être français. Mais nous ne sommes pas vraiment cools... C'est comme porte de fausses converses. Les gens veulent être cools mais ils n'ont pas assez d'argent.
J'allais vous demander si vous aimiez le thé mais apparemment oui vu les tasses qu'il y a sur la table...
Michael : Ouais, on aime tous le thé. Ginger en a une collection qu'elle emmène à chaque fois.
(S'ensuit une discussion sur les différentes plantes à mettre pour faire un bon thé.)
Pour finir, quelque chose à dire au dictaphone ?
JD (en rapant) : Checkez notre page myspace jobi jobi jobi jo, on est un groupe qui s'appelle MEN, yo !