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16.2.14

[Les fans] Jeune fille

Pour notre dossier sur les fans, on a demandé à des gens de nous raconter comment ils vivaient la chose.


Texte : Fanny
Illustration : Lola Félin

Je n'ai jamais été à proprement parler "fan" d'une personnalité ou d'un groupe. C’est sans doute pour ça que je n'ai jamais rien à répondre à la question "Quel est ton groupe préféré". J'ai plutôt en tête un panthéon d'œuvres, d'auteurs, de groupes qui m'ont obsédée sur de courtes périodes. Il m'est cependant arrivé d'éprouver quelquefois un sentiment d'adoration irrationnel et démesuré, momentané, pour certaines œuvres et leurs auteurs. Mais ce qui me pétrifie alors, dans ma relation à l'artiste, c'est l'idée de la rencontre. La peur profonde d'approcher quelqu'un qui doit certainement se contre-foutre de ce que je peux penser de son travail.

J'avais dix-sept ans environ ce soir là, lorsque j'ai pris mon vélo pour me rendre dans la nuit au Lieu Unique. Une rencontre était organisée avec Anne Wiazemski autour de la sortie de son nouveau livre, Jeune fille. A l'époque, je ne connaissais pas sa carrière d'actrice, je n'avais pas encore vu La Chinoise. Mais j'avais été attirée par la teneur autobiographique du bouquin, qui raconte son entrée dans le monde du cinéma à l'occasion du tournage de Au hasard Balthazar de Robert Bresson. Elle était alors à peine majeure, le même âge que moi au moment de ma lecture. J'étais alors sensible aux livres qui pouvaient entrer en résonance avec tous ces questionnements sur ma propre condition de jeune fille, et celui-ci m'avait sincèrement remuée. Wiazemski y décrit cette étrange expérience qui l'a vue devenir très proche de Bresson, malgré cette différence d’âge. Le réalisateur noue alors une relation complexe avec elle, presque fusionnelle. Sur le tournage, il la fait dormir dans une chambre attenante à la sienne, de façon à l'avoir toujours près de lui. Il n'est jamais question de désir sexuel de sa part pour la jeune fille, mais plutôt d'une possessivité jalouse, entre celle du père et du démiurge. Paradoxalement, il n'hésite pas à la mettre dans des situations inconfortables lors du tournage de certaines séquences, conformément à ses habitudes de mise en scène qui visent à éprouver l'acteur pour saisir l'instant juste.

1.5.13

Changement d'habitudes

Filous! Jusqu'à peu, The Knife ont toujours cultivé une part de mystère. Avançant masqués comme des corbeaux du temps des premiers succès du superbe album Silent Shout (2006), le duo suédois se plaçait à contre courant des success stories en fuyant le clinquant comme la peste et en se gardant bien d'exposer son identité dans les médias tout comme en concert. Avec le temps, le mythe s'est établi et on a fini par les associer durablement à des prestations voilées, pleines d'effets visuels et plongées dans l'obscurité. A tort. Car le groupe, qui se revendique politisé (on n'en doute plus quand on fait un tour sur leur site) n'aime rien mieux que de chambouler les habitudes. Ce n'est pas hasard si Shaking The Habitual est le titre du dernier (double!) LP sorti en avril. Et la tournée qui l'accompagne n'en est pas moins déstabilisante. De passage au Komplex à Zurich hier soir, The Knife n'en ont fait qu'à leur tête. Accompagnés d'une troupe de vrais bandits à visages découverts, ils se sont dandinés en playback dans une orgie rave pailletée. C'était horrible.

 THE KNIFE
@Komplex, Zurich 30/04/13

De façon générale, qu'attendons-nous d'un concert? Tiraillées par l'impression désagréable d'être de grosses connasses qui ne comprennent décidément rien à ce qui se passe, nous avions tout loisir de penser à cette question hier soir. Donc en général, quand on se bouge pour aller voir un groupe sur scène, c'est parce qu'on apprécie sa musique et qu'on aimerait bien le voir en vrai. On aime observer de quelle façon X maîtrise tel instrument, crée tel son, détourne tel bidule... En gros, on aime voir ce pour quoi les artistes sont payés: une démo sincère de leur job. Comme au Salon des Métiers, on décidera sur la base de la prestation si on a vraiment aimé ou pas et basta. Dans le cas du concert de The Knife, ce genre d'appréciation n'avait en fait même pas lieu d'être puisqu'au fond, il n'y a pas vraiment eu de concert. Pas au sens de "je vois les gens sur scène faire ce que j'entends" en tout cas. Grosse déception.

Pourtant, au début du moins, des silhouettes encapuchonnées ont dévoilé des instruments bizarres sur lesquels lesdites silhouettes encapuchonnées n'ont pas tardé à s'acharner (ouverture: "A Cherry On The Top"). Du lourd, du lent, du sombre façon Sunn O))) (avec juste au moins 100dB de moins) - autrement dit, ça semblait bien parti. Et puis non, les 10 millions de personnes présentes sur scène ont fini par enlever leurs capuches et danser, danser, danser, danser, danser, danser, danser, danser, danser, 

Ok. 

15.5.12

"Being at the Haçienda was like being at the French Revolution"

Début mai, le Rocking Chair remontait le temps le temps d'une soirée pleine de quinquas tout excités. Appâtées par la mention "Peter Hook" en noir sur jaune de l'affiche, nous nous sommes nous aussi précipitées à la soirée "Haçienda". Sauf que ça n'était pas terrible en fait. Du moins, pas pendant que Hook, en chemise hawaïenne, passait des tubes façon camp de ski. Un peu dépitées (non mais sérieusement mec, sérieusement?), nous nous sommes lancées dans quelques recherches, histoire de savoir comment on a bien pu en arriver là. Tentative de réponse dans cette Tisane de Mamie spéciale vieillesse ratée et fausses attentes. Ou comment des gens tout à fait respectables ont engendré David Guetta.

 THE HACIENDA 30th ANNIVERSARY TOUR
PETER HOOK, ANDREW WEATHERALL, DARREN EMERSON,

 05/05/12 @Rocking Chair, Vevey

Premièrement, avouons le illico sans honte: jusqu'à pas plus tard qu'avant l'annonce de la date au RKC, on ne savait pas précisément ce qu'était l'Haçienda. Alors pour les ignares de notre trempe, notons tout de suite que non, "Haçienda" n'est pas le nom d'un cocktail plein de feuilles de menthe qui restent coincées entre les dents. Il s'agit en fait d'un ex-club de Manchester. Un lieu mythique, fondé dans les années 80 par Tony Wilson et Rob Gretton (Factory Records) avec les thunes de New Order. Il a bouillonné jusqu'au début des années 90 avant de fermer définitivement ses portes en 1997. Pile à l'époque où je confectionnais des colliers en macaronis et des poèmes pleins de "Je t'aime" pour la fête des mères. Si l'on en croit les photos, c'était plutôt joli (le Haçienda, pas mes bricolages). Et les locaux, aujourd'hui reconvertis en parking, auraient encore des poteaux rayés (d'après ce documentaire). Mais c'est évidemment bien moins fun qu'au temps des folles rave parties.